Au Maroc, malgré la répression le peuple se mobilise pour un réel changement

vendredi 15 avril 2016
par  Alger républicain

Selon un correspondant de presse marocain, on a dénombré, jusqu’en janvier 2016, pas moins de cinquante manifestations par jour au Maroc, chiffre confirmé par le ministre de l’Intérieur. D’après celui-ci ce serait là « le signe de la bonne santé démocratique » du système qui règne chez notre voisin.

Toujours d’après ce correspondant, ces manifestations sont néanmoins le reflet « d’une réelle culture de la manifestation qui se dessine aux quatre coins du pays jusque dans les endroits les plus reculés du pays. »

« Structurés ou spontanés, parfois anciens, un nombre important de mouvements sociaux sont bel et bien vivants. Ils seraient toutefois isolés et, du coup, peinent à déboucher sur un réel changement. C’est pourquoi les autorités misent à chaque crise sur l’essoufflement, notamment en négociant séparément avec chacun »

souligne ce correspondant.

C’est une logique « caricaturale » encouragée dès l’élargissement du Mouvement des Jeunes du 20-Février, déplore l’économiste et secrétaire général de Transparency Maroc, Fouad Abdelmoumni.

« Lorsqu’il y a eu des slogans contre la corruption et l’autoritarisme, l’État a commencé à acheter la paix sociale en négociant avec chaque catégorie à part pour lui faire des concessions catégorielles, corporatistes, afin que les diverses revendications ne puissent pas s’agréger dans une revendication politique globale. Il a promis du travail aux détenteurs d’un diplôme supérieur, aux enfants du bassin phosphatier. À chaque groupe, il a fait des promesses : aux amazighistes, aux féministes, aux islamistes. Il a accordé des augmentations de salaires dont jamais les syndicats n’avaient rêvé (…) Tout cela pour dire : “On achète votre connivence, on achète votre mutisme”,

poursuit-il.

« Le pouvoir a encouragé la division du mouvement syndical et a nettement affaibli les partis et divers courants de la gauche radicale à travers la répression » accuse de son côté Mohamed Boulaich, ancien du mouvement Ila Al-Amame et ex-militant du Parti socialiste unifié (PSU). L’image du mouvement syndical est, d’après lui, avant tout ternie par son inertie :

« Les boutiques syndicales sont si nombreuses et si diverses par leurs positions et relations partisanes qu’elles s’unissent pour ne rien faire, sauf quelques réactions obligées de temps à autre pour “faire plaisir” à leurs militants et les faire taire (…) l’unité syndicale est plus que nécessaire »

insiste cet ex- responsable politique.

Toutes les tergiversations et les manœuvres du pouvoir n’ont cependant pas empêché diverses actions. Par exemple, les habitants de Tanger de sortir dans les rues pour crier leur colère contre les augmentations des factures d’électricité et d’eau. Ils ont même coupé l’électricité et manifesté durant plusieurs semaines avec des bougies à la main et ont poursuivi leur mouvement jusqu’à l’obtention d’une certaine satisfaction de leurs revendications.

Les étudiants en médecine aussi ont manifesté et observé une grève pendant près de deux mois, jusqu’à obtenir gain de cause : l’amendement du projet du service sanitaire obligatoire et une hausse de leurs indemnités.

Parmi les derniers mouvements notons celui des enseignants stagiaires qui, malgré la répression, continuent de dénoncer deux décrets ministériels. Le 20 mars passé, ils étaient plusieurs milliers dans les rues de Casablanca.

Malgré les manœuvres et la répression du pouvoir royaliste, le mécontentement ne cesse de s’élargir et de se manifester à travers tout le Maroc.

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Abdelkader Hamidi

10.04.16