Décès de Pierre Kaldor, avocat, militant du Parti communiste Français, défenseur des victimes de la répression colonialiste en Algérie.

vendredi 12 mars 2010
par  Alger républicain

11 mars 2010

Pierre Kaldor, avocat, militant du Parti communiste Français et défenseur des nationalistes et des communistes algériens, victimes de la répression colonialiste, notamment durant la guerre de libération nationale, est décédé ? Asnières, où il résidait, ce 9 mars 2010. Ses obsèques auront lieu ce vendredi 12 mars 2010.

A cette occasion, Alger républicain présente ? son épouse et ? sa famille ses sincères condoléances et leur exprime sa solidarité. En hommage ? ce valeureux combattant de la cause anticolonialiste qui a également participé ? la défense de nombreux militants de la classe ouvrière en France et dans d’autres pays, victimes de la répression des gouvernants capitalistes, Alger républicain publie un extrait de son article intitulé « Souvenirs d’avocat pendant la guerre d’Algérie » publié dans la revue « Aujourd’hui l’Afrique « de juin 2004.

Dans cet article Pierre écrit notamment :« La répression avait frappé dés avant ce qu’il est maintenant enfin convenu d’appeler « la guerre d’Algérie », c’est- ? -dire bien avant le 1er novembre 1954.
« Un groupe d’avocats français, surtout communistes, s’est trouvé aux côtés de militants algériens qui n’acceptaient plus, après la capitulation hitlérienne du 9 mai 1945, les pratiques du colonialisme.

En particulier, après les massacres du Constantinois en mai 1945 qui se chiffrent par plusieurs dizaines de milliers de morts algériens, se multiplièrent les manifestations et publications de caractère nationaliste et démocratique que l’administration française ne cessa pas de poursuivre en jetant en prison des dizaines de militants, qui furent défendus principalement par Maîtres Henri Douzon, Pierre Braun, Marcel Manville, Pierre et Renée Stibbe, Michel Bruguier.

Le journal Alger républicain un seul organe d’opposition ? l’administration, dirigé par Henri Alleg, fut aussi l’objet de poursuites continuelles et eut ? ses côtés pour le défendre Léo Matarasso, ancien chef de la résistance dans le Cantal.

Tandis que sous la pression de ces poursuites, les groupements politiques légaux ou clandestins modifiaient leurs structures, s’organisaient les prémisses de ce qui devaient être les signaux de l’insurrection nationale de l’Algérie : les attentats du 1er novembre 1954.
L’administration française généralise alors son action répressive contre l’ensemble des organisations et militants lui paraissant s’opposer ? elle.

La défense prend de l’ampleur

Les avocats français déj ? intervenus depuis 1948 reprirent de plus belle leur activité professionnelle de solidarité internationaliste, s’adjoignit quelques confrères et ce, ? l’inspiration essentielle de Maître Henri Douzon qui apparaissait ainsi ? juste titre comme l’organisateur de l’opposition judiciaire ? la répression. Quelques avocats algériens en petit nombre ont tenté de s’associer ? ce mouvement, mais connurent ? leur tour la répression ou tout simplement le boycottage organisé de leur cabinet.
Bientôt une quinzaine d’autres avocats français acceptèrent de faire des séjours en Algérie pour être ? côté des Algériens emprisonnés ? Alger. Oran, Constantine et autres lieux, délaissant leurs propres cabinets ? Paris, Marseille, Bordeaux, Lyon, Metz, Limoges, Toulouse..
Leurs confrères sur place assuraient bénévolement l’essentiel du suivi nécessaire et même les consultations au cabinet de l’absent.

La solidarité populaire assure les frais

Cette escouade de défenseurs ne recevait et ne réclamait aucun honoraire, leurs frais de transport et de séjour en Algérie leur étaient remboursés par les collectes organisées essentiellement par le Parti communiste Français, la CGT, le Secours Populaire Français, le Mouvement de la Paix.
A partir de l’hiver 1956-1957 et surtout quand ce qui était appelé « le maintien de l’ordre » fut confié ? l’armée, les arrestations deviennent massives, l’organisation de la défense par les avocats français risquait d’être débordée.

Maître Henri Douzon épuisé demande ? ne plus être son organisateur, sans renoncer ? être auprès des emprisonnés.
Le signataire de ces lignes fut alors sollicité pour le remplacer.

Le pont aérien s’organise

Dés le début de l’année 1957, ce sont plusieurs dizaines d’avocats français qui se firent les arches porteuses d’un véritable pont aérien entre la France et l’Algérie, près des deux tiers étaient communistes, les autres présentés des sensibilités de gauche plus ou moins affirmées.
Des tableaux existent encore, matérialisant sur le papier l’organisation très stricte de ce pont aérien, ils comportent huit colonnes : jour/Mois/Heure/Tribunal/Accusé/Infraction/Avocat désigné/Avocat sur place.
Des récapitulatifs partiels ont été conservés qui notent la fréquence des séjours de chaque avocat de 1956 ? 1962. Pour autant, même rentrés en France, ces avocats poursuivaient leur travail algérien, rédigeant mémoires et notes de plaidoirie, soutenant les recours en grâce devant les Présidents de la République.

D’après ces notes partielles, on peut relever qu’ont effectué de 1956 ? 1962 plus de huit séjours en Algérie, Maîtres Nicole Dreyfus, Pierre Braun(14), Michel Brugier, Roger Cevaër, Léo Matarasso (13), Roger Dosse, Armand Dimet, Maurice Zavarro, Gaston Amblard, Marie-Louise Cachin, René Stibbe. Personnellement, j’ai effectué dix-huit séjours. ?Les mêmes et d’autres défendent également les Algériens détenus en France pour leur militantisme, chacun d’entre nous dispose sinon d’archives, du moins d’une masse de souvenirs qui valent d’être rapportés. Aujourd’hui l’Afrique s’efforcera de s’en faire l’écho dans la suite de sa publication.
Certains avocats ont été inquiétés sur place. Pendant l’activité de l’OAS, Maîtres Gisèle Halimi et Pierre Braun ont été internés au moins une semaine. Moi-même ai été arrêté en décembre 1960, interné quelques heures ? l’aéroport de la Senia près d’Oran et au camp d’Arcole avant de faire l’objet d’un arrêté d’interdiction d’accès en Algérie, qui malgré d’importantes interventions n’a jamais été rapporté. »

Pierre Kaldor

NB. Un autre groupe d’avocats français, très lié ? la direction du Front de Libération Nationale (FLN) comportant une dizaine de membres a également défendu les Algériens poursuivis. Il était dirigé par Maître Jacques Vergés.