Droits des femmes en Algérie.

samedi 6 mars 2010
par  Alger républicain

En Algérie les droits des femmes ont progressé quand les forces de progrès étaient plus influentes et détenaient l’initiative dans la mobilisation des masses. Ils ont régressé avec l’emprise absolue des courants réactionnaires sur les appareils d’État.

En Algérie les droits des femmes ont progressé quand les forces de progrès étaient plus influentes et détenaient l’initiative dans la mobilisation des masses. Ils ont régressé avec l’emprise absolue des courants réactionnaires sur les appareils d’État.

La participation des femmes, sous les formes les plus diverses, au combat politique ou armé pour la libération nationale a eu pour résultat des avancées importantes dans leur place dans la société après l’indépendance.

A l’époque coloniale peu de femmes travaillaient. De toutes façons le chômage massif était la règle dans une société où toutes les richesses appartenaient aux « Cent seigneurs ». Parmi les femmes rangées par le recensement de 1951 dans la catégorie des occupées, plus d’un million d’entre elles étaient classées comme « aides-familiales » agricoles. Cette rubrique permettait de masquer l’étendue du chômage en considérant comme « occupée » la femme qui trait une chèvre ou ramasse les œufs de poules ! En novembre 1954 il n’y avait en réalité que 30000 femmes qui exerçaient une activité économique hors de l’agriculture. Encore faut-il préciser que 24000 d’entre elles étaient des femmes de ménage !
Voilà le « bilan positif » de la colonisation pour les femmes algériennes.

Le droit au travail a été proclamé à l’indépendance. L’Algérie indépendante a fait plus en quelques années pour l’instruction des filles et l’emploi des femmes à de dignes postes de travail que la colonisation en 132 ans.
Il y a aujourd’hui des milliers d’ingénieur(e)s et de techniciennes supérieures, ainsi que des dizaines de milliers d’ouvrières qualifiées. Plus de la moitié des enseignants, des médecins et des magistrats sont aujourd’hui des femmes.

Le travail est un facteur d’émancipation quoi qu’en disent les adeptes d’un féminisme étroit. La preuve c’est l’irruption extraordinaire des femmes dans les grèves des enseignants et des médecins de ces dernières semaines. Une grande révolution mentale et intellectuelle qui prépare le terrain à d’autres révolutions à venir, des révolutions plus radicales !

De 1962 à 1984, année du Code de la famille, la femme pouvait se marier sans avoir besoin de tuteur. L’acte de mariage était établi par l’officier d’État-civil en présence seulement des deux époux accompagnés de leurs deux témoins. La femme a obtenu en 1962 pour ainsi dire « naturellement » le droit d’ouvrir un compte bancaire et de détenir un carnet de chèque sans difficultés, au même titre que l’homme, ce qui n’était pas encore acquis dans nombre de pays plus « évolués ». Dans le secteur public le salaire de la femme est égal à celui de l’homme à qualification identique.

Le virage à droite des années 1980, expression du renforcement des puissances d’argent et de la montée d’une réaction qui voulait donner un coup d’arrêt aux promesses révolutionnaires, n’a épargné aucun secteur : article 120 destituant les responsables des organisations de masse s’ils ne sont pas membres du FLN, centaines de cadres jetés injustement en prisons, début de la lente destruction du secteur public économique et arrêt de l’industrialisation, renforcement des liens avec les USA et les monarchies du Golfe, remise en cause de la révolution agraire, intrusion massive du religieux dans le contenu du manuel scolaire et … promulgation du Code de la famille. C’est une période de réaction globale qui s’est ouverte en 1980 et se poursuit encore. Ce n’est pas le fait du hasard si dans les années 1980 les femmes ont été violemment attaquées dans les modalités de paiement de leur congé de maternité. Et cette attaque a été lancée par une femme imbue de conceptions réactionnaires nommée à la tête du ministère du Travail et de la Protection sociale sur la seule base de son hostilité aux militants et sympathisants du PAGS activant dans ce secteur !

En dépit de leurs tentatives de confiner les femmes à leur foyer, les forces conservatrices n’ont pas réussi à enrayer complètement le travail des femmes. Les pressions réactionnaires, intégristes ou islamistes « modérées », n’ont pas empêché les femmes d’être de plus en plus nombreuses dans la vie active et sur les bancs de l’Université. Plus de 1,3 millions de femmes sont occupées en dehors de l’agriculture. C’est plus de 40 fois plus par rapport à 1951. Il est vrai que le pourcentage des femmes occupées demeure faible, 15,3% selon l’ONS. La cause de cette faiblesse est liée à la politique d’un pouvoir dominé par les importateurs et refusant de promouvoir les secteurs productifs.

Les femmes qui travaillent dans le secteur privé sont exploitées de façon éhontée. Aussi bien dans le privé que dans le public, elles subissent des vexations et brimades de toutes sortes et notamment le harcèlement sexuel, dans le contexte de la domination des courants réactionnaires de la société et du spectre d’un chômage propice à tous les chantages odieux.
Les femmes se heurtent à l’obscurantisme, aux conceptions religieuses dépassées, aux préjugés profondément ancrés chez une majorité d’hommes n’acceptant pas que leur femme travaille. Tout le monde a encore en mémoire l’agression sauvage perpétrée à l’aide de gourdins et de sabres contre des femmes travailleuses sans défense habitant un bidonville de Hassi Messaoud par une horde d’une centaine d’individus chauffés à blanc par le prêche d’un Imam, en juillet 2001. Victimes de viols collectifs et traumatisées à vie, les femmes qui étaient venues gagner leur vie dans cette ville pétrolière, ont dû quitter la région et renoncer au travail qui les faisait vivre.

Leur combat pour la pleine égalité devra se poursuivre en liaison avec les luttes sociales.

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Nadir Amar