Ils ont entamé hier un mouvement de grève illimitée Les employés de Hyundai Motor Algérie en colère

jeudi 5 mai 2011

Plus de 430 travailleurs de l’entreprise Hyundai Motor Algérie (HMA), filiale du groupe Cevital, observent depuis hier un mouvement de grève illimitée pour réclamer « des salaires décents » et exiger une couverture sociale, une médecine du travail ainsi que l’amélioration des conditions d’hygiène.

« Une société prospère, des ouvriers pauvres », reprenaient tel un leitmotiv des employés rencontrés devant le siège de l’entreprise à Oued-Smar. M. Benniche Ahmed, secrétaire général de la section syndicale affiliée à l’UGTA, a fait part du désarroi des travailleurs qui attendent l’augmentation de leurs salaires depuis 2008. « A cette date-là , une nouvelle grille de salaires avait été élaborée par le groupe Cevital, dont nous dépendons. Or, nous avons eu quelques échos d’informations faisant état d’augmentations dont ont bénéficié les autres filiales du groupe, sans que nous en soyions concernés », se désole le syndicaliste.

« Les salaires sont restés figés, la direction faisant fi même des mises en garde de la société mère qui a interpellé le DG pour nous accorder des augmentations, a fortiori quand l’entreprise est leader sur le marché », souligne-t-il. « Est-il acceptable que dans une entreprise de 50 000 véhicules, les travailleurs en arrivent à percevoir un salaire en dessous du Salaire national minimum garanti (SNMG) ? » s’interrogent les employés dans une lettre envoyée au P-DG de Cevital, Issad Rebrab.

« Il y a dans une des principales filiales du groupe, en l’occurrence HMA, une cheville ouvrière qui peine et qui vit dans le dénuement total », peut-on lire dans cette lettre. Les employés ont saisi l’occasion pour lancer un « cri de détresse » à l’intention de M. Issad Rebrab, tout en le prévenant d’« une situation qui risque d’aboutir à des dérapages et à des actions incontrôlées ». « Cette missive, nous l’avons adressée au P-DG le 9 février 2011. Quelques jours après, M. Issad Rebrab était venu s’enquérir de la situation. Il est resté une semaine sans qu’il y ait de résultat probant », s’indigne M. Benniche. Ce dernier fait part du « décalage immense » en termes de salaires entre les entreprises concurrentes et la HMA.

« Nous avons exhibé au DG des fiches de paie d’employés d’entreprises concurrentes et il s’est rendu compte lui-même du fait qu’il n’y a pas photo entre ce que perçoivent nos concurrents et ce que nous percevons. Il en a même pris acte ; cependant, aucune suite ne nous a été donnée », a-t-il indiqué.

Pour donner un aperçu des salaires « misérables » qu’ils touchent, certains employés nous ont montré leurs fiches de paie comme pour joindre le geste à la parole.

Un mécanicien qui cumule quatorze années de service au sein de HMA confiera que son salaire de base est de 13 168 DA (24 000 DA/mois salaire net).
Le président de la section syndicale de l’entreprise, M. Benniche, qui exerce depuis onze années au sein de l’entreprise, perçoit un salaire de 22 000 DA/mois.
Le cas d’un chauffeur-livreur est encore plus édifiant. Son salaire de base n’est que de 10 000 DA, alors que son salaire net ne dépasse pas 19 000/mois. Son collègue, chef d’équipe de son état, perçoit un salaire de 9 600 DA/mois, après quatorze ans de service.

Les employés regrettent, en outre, qu’ils n’aient jamais bénéficié de « cycles de formation, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur du pays, contrairement à nos homologues des sociétés concurrentes », fulmine un employé. Selon Ahmed Benniche, la direction de HMA aurait proféré des menaces de radiation à l’encontre des grévistes, « sachant pertinemment que notre mouvement est décrété légal, y compris par l’inspection du Travail », a-t-il relevé.

Signalons que nos tentatives de joindre M. Omar Rebrab, DG de HMA, se sont avérées vaines, son téléphone cellulaire étant tout simplement éteint. Sa chargée de communication, Kahina Moubri, s’est refusée à toute déclaration, arguant qu’elle « n’était pas au courant » de cette grève puisqu’elle venait juste de rentrer d’un congé.

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Younès Djama

in La Tribune du 3 mai 2011