Mondial du Brésil : le sens d’une liesse populaire

samedi 28 juin 2014
par  Alger républicain

L’Algérie vient de se qualifier aux huitièmes de finale de la coupe du monde de football qui se déroule cette année au Brésil, le pays de Pelé ce footballeur qui demeure, malgré ses compromissions avec les différents régimes de son pays, une icône pour plusieurs générations de jeunes qui rêvaient d’arriver au ciel avec l’envol de leur ballon.

Une grande réussite déjà pour cette jeune équipe qui enrage d’atteindre un objectif si difficile et rendu quasi inaccessible par les contraintes considérables qu’il faut surmonter à chaque étape à dépasser.
Jeudi soir, l’équipe d’Algérie a relevé le défi avec une remarquable élégance et elle sera le 28 juin 2014 dans le groupe des huitièmes de finale de la coupe du monde pour la première fois de son histoire.

Equipe d'Algerie - <span class="caps">DR</span>

Dans toutes les villes d’Algérie, au Brésil, au Canada, en France et dans tous les lieux de la planète où ils se sont répandus, les Algériens ont chanté et pleuré de joie, extériorisant une intense émotion. Mais les émotions créent souvent des excès. Cela a donné en France, mêlés à la joie, des dégâts, des dérapages, des actes de vandalisme inattendus, qui auraient pu être évités à moins qu’il ne s’agisse de provocations montées par les nostalgiques du colonialisme incapables de réprimer leur haine pour l’Algérie.

Le peuple algérien et sa jeunesse de condition modeste vivent dans leur très grande majorité de graves problèmes. Des problèmes de devenir, de chômage, de niveau de vie, d’études, d’accès au savoir, à la santé, à la science, à la liberté, au respect.

Le peuple algérien est banni de toute participation aux décisions sur les choix économiques du pays, sur la rente pétrolière dont il est le seul propriétaire légitime, quoi qu’en pensent les dirigeants représentants les classes possédantes parasitaires auxquels s’ajoutent les convoitises extérieures.

Et c’est tout cela que cette jeunesse qui a laissé éclater sa joie immense jusqu’au délire à travers le monde, revendiquait confusément. Elle a déversé dans le football toutes ses frustrations et sa rage de vivre, ainsi que son attachement spontané à la défense de l’image de sa nation contre les convoitises des puissants qui ont fait d’elle un otage et une victime de basses rapines.

Nos gouvernants qui savent bien tout cela, ont permis à quelques milliers de jeunes qui avaient pu trouver les moyens, d’accéder à un change légal pour obtenir des devises et se permettre d’aller jusqu’au Brésil afin de supporter l’équipe nationale.

Nos mêmes « bienveillants » gouvernants sont habiles dans l’art de détourner momentanément les aspirations des jeunes en leur offrant du foot à regarder, afin de faire oublier les prix des fruits et légumes qui flambent à la veille du Ramadhan, la douleur des travailleurs mis à la porte pour avoir réclamé leur droits les plus élémentaires à Lafarge, Cevital, la Brasserie de Rouiba, les Moulins de Mahdia, etc., afin de faire taire aussi les chômeurs de Ouargla et ceux de tout le pays, pour tenter également d’étouffer sous une chape de plomb le combat des paysans de Draa Ben Khadda contre la restitution des terres nationalisées après l’indépendance, aux descendants des collaborateurs du colonialisme, etc.

Le régime et la presse marchande, à coups de « Unes » chauvines et indignes des idéaux d’un peuple qui avait bénéficié durant sa guerre de libération du soutien de tous les peuples, savent imposer une sorte de trêve sociale qui n’empêchera pas les privilégiés de continuer quant à eux à se remplir les poches avec la bénédiction du régime et des adeptes de l’ « économie de marché ».

La jeunesse acceptera-t-elle sans révolte, de continuer à s’adosser aux murs du pays sur lesquels s’accrocheront seulement ses frustrations et ses interminables attentes d’une vie où le rêve de survie est seulement de trouver une fantasmatique solution de « t’bèzniss » pour s’en sortir ? Ou bien mènera-t-elle le combat pour une nouvelle société par l’éradication des privilèges, de l’exploitation, des inégalités de classe, de la corruption, le combat contre les complots des puissances impérialistes et leurs collaborateurs internes ?

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Mohand Izem

Alger républicain

27.06.14