PALESTINE : Chant de leur propre épouvante.

dimanche 24 août 2014

Extraits d’un texte de Smail Hadj Ali sur l’oppression et la violence colonialiste israélo-sionistes.
Ce texte s’appuie sur des faits et des discours réels des oppresseurs et de leurs supplétifs européens et français en particulier.
Ce texte emprunte quelquefois, en les fusionnant, des mots de Brecht, Neruda, Darwich.

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« Il y a un État, et il est différent de tous les autres. Il est juif, et pour cela il est plus humain que n’importe quel autre ».

Elie Wiesel, Kansas City, 1970.

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« L’armée israélienne est la plus morale du monde ».

Bernard-Henri Lévy, 2010.

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Chant de leur propre épouvante.

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« Nous sommes les oiseaux de la mort

Venus sur vos cités

Femmes pour vos enfants

Vouées à trembler »

Avec nos yeux

Et ceux de nos machines

Eveillés émerveillés

Nous vous avons ciblé

Pour tuer détruire

C’est vrai y a rien à y redire

Mais nous avons

Une autre raison

Essayer de la découvrir

Devinez ? Vous ne savez pas ?

C’est si simple croyez-moi

C’est pour que vous ayez

En chœur et encore

La peur au corps

La peur encorps

Chaque jour et toujours

C’est pour vous apprendre

Et réapprendre la terreur

Chaque heure

Chaque jour

Dans vos corps

Dans vos cœurs

Nous,

Nous connaissons admirablement

Le chemin étroit

Qui conduit à l’abîme

En dormant, en priant

En riant en tuant

En même temps

Nous le trouvons

Au bon moment

Suivez-nous

Regardez-nous

Nous sommes

« Civilisation » « tolérance »

« Sagesse » « conscience »

Nos passages

Des fumées noires

Les font voir

Adeptes « de la pureté des armes » [1]

Missionnaires du feu qui tue

Des flammes

Et du « nouveau napalm » [2]

Apôtres du meurtre ciblé

Notre combat est légitimé

C’est pour cela

Que nos amis nous livrent

Sans discontinuer

Ni bourse déliée

Des armes sans compter

Et des « chants d’amour »

Ils font la différence

Comme le Président de France

Récemment en conscience

Au nom des Français

Il s’est exclamé

« C’est une inoubliable soirée »

Puis il s’est adressé

A notre boss amusé

« Je ne sais pas chanter

Mais j’aurais toujours trouvé

Un chant d’amour pour Israël

Et pour ses dirigeants

Entre nous maintenant

On ne pourra voir

Que la vie en rose »

C’est que voyez-vous

Notre politique en impose

De telles paroles

Sont compréhension

Absolution compassion

Elles nous encouragent

À vénérer le néant

Ecoutez à cet effet

Ce que racontait

Un des nôtres

Il est aussi des vôtres

Il fut chef d’état-major

À toi Dan [3]

Merci Ariel

Pilote de chasseur-bombardier

Je sais aussi larguer

Des bombes au phosphore

Du crépuscule à l’aurore

J’ai été aussi

Chef d’escadrille

D’avions Phantom

C’est eux qui chargèrent

Des bombes nucléaires

Sur ordre de Golda Meir

Pour se préparer à toute éventualité

On ne sait jamais

C’était en 1973

ll y en avait 13

On aurait pu tout foutre en l’air

Mais après-nous le déluge

Mais qui suis-je ?

Dans la vie psychanalyste

Petit fils de gazés d’Auschwitz

J’ai effacé totalement

Le regard des miens

Et ne sais plus

Ce que ma grand-mère fut

Elle n’a pas de tombe

Quand je largue une bombe

Je ressens dans mon F16

« Une très légère secousse »

Sensuelle presque douce

Une seconde après elle a disparu

Je jouis alors en trombe

C’est ce que je ressens

Quand je largue une bombe [4]

Sur les Arabes

Voluptas necandi

Mais passons

Où plutôt revenons

A nos moutons

Notre combat est intemporel

C’est une guerre perpétuelle

Du crépuscule à l’aurore

D’un commun accord

Aux Palestiniens tout le temps

Aux Libanais de temps en temps

Nous distribuons

La fin et la terreur

Guidées par des « désignateurs lasers »

Nos bombes de haute précision

Comme un chalumeau

Transforment ces multitudes en charbon

Les engins nord-américains

Entre nos mains

Tuent de jour de nuit

Et parfois même

Sans faire de bruit

Un tir précis

Sur un immeuble

Un lot d’habitations

Une école une maison

Une ambulance

Un service d’urgence

Grâce à nos bombes standards

Ne nous coûte pas plus d’un dollar

Il n’y a pas de petits profits

Dernièrement on a détruit

Chez les ghazaouis

Seize mille maisons

Grâce à nos images satellites

Tels des « cancrelats » ou des termites

Comme à Marhawine où à Aytit

À Jabalya Rafah Shadjaiyé

Nous les voyons grouiller

Pour enterrer leurs macchabées

Dans des fosses fraîchement creusées

Et parfois dans des caisses

De mauvais bois

A deux à quatre

A la fois

Et plus parfois

Maintenant

Dans ces décharges

Charniers sauvages

Ces cadavres en vrac

A Gaza comme en Iraq

Sont mis en sacs

Poubelles pêle-mêle

Nous avons pu d’ailleurs

Avec les tout derniers viseurs

Nos fameuses « Têtes hautes »

Voir qu’ils n’en n’ont plus

Pour leurs débris

Leurs organes déchiquetés

En monceaux dispersés

Et ce qui subsiste encore

De leurs dépouilles putréfiées

Par les chiens errants

Sont dévorées

De ces cadavres abondants

Ils n’en peuvent plus

Ces pauvres canidés

Ils en ont la nausée

De là-haut

Malgré la nuit noire

On peut les voir

Vomir dégueuler

Le trop plein

De leur festin

Pour l’essentiel

C’est des cadavres de terroristes

Certes il y a des vieux des gamins

Des malades de toutes sortes

De folie et d’Alzheimer

Des grands-pères

Et des grands-mères

Et des mongoliens

C’est du collatéral

On n’y peut rien

Mais j’en ai trop dit

Je vais céder la parole

A Peretz [5] ce cher Amir

Il est si l’on peut dire

N’y voyez pas une offense

Le nouveau patron de la Défense

Il n’est pas du métier

Mais il s’est vite adapté

Peretz ? :

« Merci Dan c’est sympa

De partager la parole avec moi

Chef des soldats élus

Cela me fait tout drôle

De tenir un tel rôle

C’est vrai je viens du syndicat

Avec ses meetings et son blabla

Je ne suis pas un pur militaire

Certes j’ai déjà fait cette guerre

Mais en devenir le chef

C’est une autre affaire

A vrai dire c’est tout bénef

Pour les prochaines élections

Fort heureusement

Nous sommes polyvalents

Et n’avons pas besoin

De nous recycler

Pour prendre notre part

À la défense de la liberté

Comme Malraux disait

BHL me l’a soufflé

C’est parce qu’on fait cette guerre

Sans vraiment l’aimer

Qu’on finit toujours par la gagner

« Notre armée est pure

Elle ne tue pas d’enfants »

« Nous avons une conscience

Et des valeurs

Et à cause de notre morale

Il y a peu de victimes »

De plus elle est « sympathique »

Ouverte et démocratique

Ni guindée, ni martiale

Ni sûre d’elle-même

Plus décontractée

Qu’elle tu meurs

Diriger une telle armée

Est un bonheur une destinée

Elle a « la parole libre »

La plus libre du monde

C’est vrai nous la critiquons

Mais une fois la guerre arrêtée

Et seulement dans le but d’améliorer

Nos méthodes notre efficacité

Mais aussi pour éviter

De trop tuer

Notre armée est

« Joyeuse bousculade »

Belle cavalcade

Pareils à ces jeunes « républicains espagnols »

Que Malraux a si bien décrit

C’est encore Bernard-Henri

Qui me l’a dit

Il le cite souvent dans ses écrits

Et dans ses nombreuses sorties

Ce sont « des soldats-savants »

Le nez collé sur leurs viseurs

Les yeux sur les écrans

Ils calculent la vitesse de déplacement

De toutes les cibles possibles

Et le degré de proximité

De civils et d’enfants

Pour pratiquer « l’évitement » [6]

Car notre armée est virginale

Et dans cette guerre totale

Elle ne tue pas les innocents

Oui

Il y a eu ces quatre enfants

Sur une plage de Ghaza

On dit qu’ils jouaient au football

Mais ça reste à vérifier

Si c’est vrai ça reste marginal

Ah ! Ces petits Arabes

Ils sont intenables

Mais nous allons enquêter

« Consciencieusement

Sur cet incident »

Et c’est très naturellement

On ne leur demande pas tant

Que les médias et les journaux

BFM et le Figaro

Ont repris cette info

Avec nos propres mots

Ce sont nos valeurs nos idéaux,

C’est pour cela

Encore une fois

Qu’il y a peu de « victimes [7]

Chez eux »

Quelques milliers au plus

On dit que ce sont des civils

Mais allez distinguer

Il y a des enfants

Mais nos soldats-savants

Sont aussi des enfants

Ils ne peuvent à chaque instant

Appliquer correctement

Notre principe d’« évitement »

De plus la technique n’est pas fiable

A cent pour cent

Ah oui j’allais oublier

De vous parler de toutes nos précautions

Comme par exemple

Nos « tirs d’avertissement »

Ce sont des missiles

Largués par nos avions

Sur leurs immeubles

Et leurs maisons

Vous voyez tout est fait

Pour ne pas trop tuer

Nous venons même de créer

Une « banque de cibles »

Nous ne sommes pas infaillibles

Nous avons établi aussi

Une « carte de la souffrance »

Ça améliore nos performances

Ça limite les « bavures »

Mais les Arabes

Ça bouge tout le temps

Comme l’a bien martelé

Un de nos comiques troupiers

A la télé des Français

Les Arabes doivent mieux contrôler

Leurs impossibles nichées

Ils doivent les tenir en laisse

Avant lui il y a deux décennies

Ce cher Anthony Burgess

L’avait dit et redit :

« Ces gens sont comme les chiens

Ils ne comprennent que le bâton »

Menahem en avait dit autant

Avec raison

Ce sont « des bêtes

Qui marchent sur deux pieds »,

« Des criquets qui devraient être écrasés »

A ce propos je ne résiste pas à l’envie

De vous citer quelques bons mots

De nos chefs et généraux

Ça peut paraître exagéré

Mais je n’ai rien inventé

En voici quelques extraits

« Les palestiniens

Sont des criquets …

Ils seront écrasés

Et leurs têtes éclatées

Contre les murs et les rochers » [8]

« Comme des cafards drogués [9]

Dans une bouteille

Les Arabes tournent en rond »

« Ils sont comme des crocodiles

Plus vous leur donnez de viande

Plus ils en veulent » [10]

« Ce sont des cancrelats dans un bocal »

Bon, arrêtons là ce festival

Nous venons de bombarder une zone du Mal

Il semble que c’est leur quartier général

On me dit que c’est un hôpital

Je vais aux nouvelles fraîches

Je vous vois plus tard,

Probablement ce soir

Je viendrais parler

À vos journaux télévisés

De notre combat civilisé

VOIX D’UN ENFANT PALESTINIEN TUÉ PAR UNE BOMBE ALORS QUIL JOUAIT AU FOOTBALL.

Venez voir le sang dans nos rues

Venez voir le sang dans nos rues

Le sang dans nos rues

Dans nos rues

Le sang

Nos rues

Venez voir

Venez voir

Nous vivons dans des mouroirs

Ils nous tuent à bout portant

À tout bout de champs

Hier nous jouions au ballon

À Ghaza sur la plage

Zakaria Ahed

Mohamed Ismaël

Deux missiles d’Israël

Nous ont pulvérisés

Par le travers en mille

Et trahi notre insouciance

Mais soyez sans crainte

Le cœur de la Terre bat

À Jenin à Ghaza

À Deir Yassine à Ramallah

À Khan Younes et à Qana

« Le cœur de la Terre bat

Il saigne, mais il bat »

Nous continuerons à jouer au ballon

Sur nos plages notre sable

Nous grandirons garçons et filles

Et de nos mains surgira un fusil

D’où jailliront les balles

Qui trouveront l’endroit du cœur

De ces assassins chacals

Que le chacal repousserait

Des charognardes hyènes

Que l’hyène fuirait

Pierres que la pierre

En crachant mordrait

Venins de vipères

Que les vipères vomiraient

Mais soyez sans crainte

Nous cultivons l’amour la vie

Pour notre humble patrie

Et la certitude du yasmine

Pour notre belle Falestine

Smaïl Hadj Ali

Texte réouvert en 2006…


[1Bernard –Henry Lévy, dixit.

[2Bombes au phosphore blanc.

[3Dan Halutz, chef d’Etat-major.

[4Propos de Dan Halutz, chef d’état-major de l’armée israélienne.

[5Ministre de la défense, anciennement chef du syndicat Histadrout

[6Extrait d’un texte de Bernard Henry Lévy

[7«  Tsahal  » , film de Claude Lanzmann

[8Itzhak Shamir

[9Raphaël Eytan

[10Ehud Barak