Syrie : les rebelles d’Alep sont quasi exclusivement des islamistes

mardi 9 août 2016

Encerclés dans les quartiers qu’ils contrôlent encore, les djihadistes essaient de desserrer l’étau. L’Armée syrienne libre est absente.

Alep, véritable capitale économique de la Syrie, est aujourd’hui le lieu de toutes les batailles. La moitié de la cité est aux mains des « rebelles », qualificatif qui masque la réalité de ce qu’ils représentent réellement. Ces rebelles sont quasi exclusivement des islamistes, regroupés au sein de différentes factions dont la plus importante est l’ancien Front al-Nosra (Jabhat al-Nosra) qui vient de se démarquer de la maison mère al-Qaida avec l’accord du successeur d’Oussama Ben Laden, l’Égyptien Ayman Al Zawahiri, et qui s’appelle désormais le Front Fateh al-Cham. Un changement d’appellation surtout stratégique – le but, l’instauration d’un régime islamique qui n’a rien à envier à Daech, restant le même – qui pourrait avoir pour objectif de présenter une face « plus lisse » et d’être incontournable pour toute solution négociée. L’ensemble de ces groupes islamistes – qui disposent par ailleurs d’armes saisies dans les casernes de l’armée syrienne mais aussi fournies par les pays occidentaux, du Golfe et de la Turquie – sont maintenant encerclés dans les quartiers d’Alep qu’ils tiennent toujours.

Mais depuis la prise de la route de Castello –une voie menant les djihadistes en Turquie et leur permettant des approvisionnements de toutes sortes – par l’armée nationale syrienne, le rapport de forces s’est modifié. Appuyés par l’aviation russe, les soldats syriens ont repris de nouvelles positions près d’Alep. Une contre-offensive qui a réduit presque à néant les gains engrangés par les « rebelles » lors de leur offensive lancée dimanche pour briser le siège. Selon le quotidien pro-gouvernemental Al-Watan, les forces de Damas « avancent de nouveau au sud et sud-ouest d’Alep après les importants revers subis » par les groupes ?djihadistes. L’objectif premier de l’assaut des islamistes était de s’emparer du quartier ?gouvernemental de Ramoussa – situé à la périphérie sud-ouest d’Alep –, dont le contrôle permettrait aux rebelles d’ouvrir un axe de ravitaillement vers leurs quartiers est. C’est aussi à travers Ramoussa que transite le ravitaillement de l’armée et des civils dans la partie ouest d’Alep. Selon le site pro-gouvernemental Al- ?Masdar News, « les rebelles ont réussi à entrer à Ramoussa en faisant exploser un tunnel qu’ils avaient foré, mais ils ont ensuite été bloqués et ont dû se retirer après une féroce bataille, et le régime contrôle complètement le quartier ».

Évidemment, la carte politique s’est modifiée. Plus personne ne parle de l’Armée syrienne libre, censée représenter sur le terrain militaire une opposition soutenue par la France, les États-Unis et l’Arabie saoudite notamment. Ce qui explique sans doute l’attitude du secrétaire d’État américain, John Kerry, qui a exhorté les protagonistes à Alep à faire preuve de retenue ?! Un appel jugé « inacceptable » par Moscou.

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Extraits d’un article de Pierre Barbancey

in L’Humanité du 4 août 2016