Capitalisme pourrissant et « Panama Papers »

dimanche 21 août 2016
par  Alger republicain

Le Panama, petit Etat d’Amérique centrale, n’en est pas à son premier scandale. Et tous les scandales dont il a été le foyer ont trait aux compagnies étrangères occidentales liées à la finance.

Le premier scandale a concerné en 1889 le percement du canal, dit Canal de Panama . Il avait dévoilé la corruption de plusieurs personnalités politiques françaises qui avaient ruiné des milliers d’épargnants français.

Pour réaliser et gérer le percement du canal, Ferdinand de Lesseps qui dirigeait la compagnie universelle du canal de Panama, avait lancé une souscription publique de types obligations ou actions.

Une partie des fonds récoltés a servi à soudoyer des personnalités politiques et des … journalistes. Le reste des fonds collectés n’avait pas suffi à la réalisation des travaux : la compagnie fut mise en liquidation judiciaire.

Nous ne sommes donc pas à un scandale près et la corruption des journalistes et des personnalités politiques ne peut être éludée non plus dans le présent scandale.
Blanchiment d’argent, évasion et fraude fiscales, circulation pharaonique et criminelle de capitaux impliquant selon les informations livrées de nombreux dirigeants : les sultans du Moyen Orient, des chefs d’Etats africains, sud américains et, pour un peu de crédibilité, le Premier ministre islandais (Sigmunder Gunnlagson) et à moindre importance son homologue britannique … un moyen de pression contre ce dernier pour le faire reculer dans sa politique du Brexit qui a dérangé au plus haut point les multinationales.

En Algérie, le nom de Bouchouareb, ministre de l’Industrie, a été cité. Le malheureux essuie un feu roulant durant des semaines sous les tirs d’éditorialistes de presse qui l’ont pris en grippe. L’opinion apprend qu’il est titulaire d’un compte secret de plus de 700 000 dollars. Il se retrouve sous le feu des projecteurs mais s’abstient de s’expliquer sur l’origine de cette somme, s’engageant seulement à adresser un rapport au président de la République à ce sujet.

Les pays de l’Est de l’Europe ne sont pas en reste, Porochenko pour l’Ukraine et un proche collaborateur de Poutine pour la Russie. Le premier est contesté dans son pays, et même s’il plie devant toutes les exigences occidentales, il risque d’être lâché par ses maîtres et sans état d’âme … Le second, a déclaré que toute cette opération est dirigée contre lui. Selon lui la société journalistique qui a oeuvré à ce scandale et dont les membres triés sur le volet en vertu de leur soumission aux commanditaires de l’opération, sont issus de 76 pays occidentaux (le quotidien allemand Süddentnche Zeitung, le quotidien français Le Monde, des journalistes de France 2, le quotidien israëlien Haaretz, etc.). Ce sont des agents de la CIA et d’autres services secrets américains. Il n’y pas de raison de ne pas le croire. Mais le fait est là, le capitalisme restauré en Russie par le vol du fruit du travail de la classe ouvrière soviétique, sous les applaudissements frénétiques de tout le « monde libre », ne pouvait produire plus parlante image de sa nature sordide que cette affaire.

Des déclarations comme celle de Poutine sur les buts inavoués de l’opération sont systématiquement raillées par la presse occidentale qui se targue de jouir de la plus grande liberté d’expression.
Les 11,5 millions de documents divulgués par ces journalistes mettent en cause un cabinet d’avocat , Mossack Fonseca, dont le père fondateur n’est autre que Waffen, un SS allemand …

Le Panama, seul paradis fiscal dans le monde ?

Le monde occidental découvre effaré que des capitaux faramineux circulent et sont planqués dans ce petit pays du tiers monde au mépris des règles financières et monétaires. Rien que ça. Mais le scandale que l’on présente comme une pharaonique nébuleuse échappant aux pouvoirs originels des sociétés offshore n’est en réalité qu’un montage.

Car les paradis fiscaux constituent désormais un élément organiquement lié au fonctionnement d’ensemble du système capitaliste. Une pratique délictueuse à une échelle de plus en plus importante pour compenser par une savante évasion fiscale la baisse tendancielle du taux de profit. Et, malgré les révélations cycliques et bruyantes, cette situation est appelée à se reproduire sans cesse aussi longtemps que durera le système capitaliste.

Des paradis fiscaux, il en existe une kyrielle à travers le monde : les Îles vierges britanniques, le Luxembourg, le Lichenstein, le Liban, le Suisse, la France, sans oublier le fameux Etat du Delaware aux USA et la célèbre London City, tous les deux épargnés par les investigations sélectives, pour la simple raison qu’ils abritent les protégés et hommes de paille de l’impérialisme anglo-étatsunien, etc. On explique que ces places respectent les règles de transparence. Transparence envers qui ? Envers les peuples ou les officines de renseignement et les services de subversion, CIA, FBI ou M16 ?
Curieusement, aucun chef d’Etat occidental, ni aucune personnalité occidentale de premier plan, n’a été inquiété. Est-ce à dire que les dirigeants occidentaux sont au-dessus de tout soupçon de corruption et de gabegie ? Voire …

En vérité le système de sociétés offshore existe et existera tant que le système capitaliste n’est pas démantelé. Il abritera encore d’énormes évasions fiscales au su et au vu des Etats. Les dirigeants de ce monde le savent et le soutiennent.

Si le scandale a éclaté, l’explication logique en est toute simple. Le petit Panama a osé défier le grand voisin. Il avait jusque-là opposé un non catégorique à sa prétention à exercer un droit de regard sur l’identité des titulaires des comptes secrets qui avaient cru échapper ainsi à l’oeil de Washington. Un refus intolérable pour les USA ! Car, avoir la liste de personnalisées économiques ou politiques coupables de fraude par rapport à la loi de leurs pays, c’est détenir un instrument de chantage redoutable pour forcer les délinquants du beau monde à s’intégrer dans leur armée mondiale de marionnettes.

Le courroux de son puissant voisin nous rappelle l’affaire Noriega. Un sinistre « gorille », c’est ainsi qu’on désignait en Amérique latine les généraux imposés par les USA au moyen de sanglants coups d’Etat pour mettre au pas les peuples récalcitrants. Le général Noriega faisait leur affaire. Qu’importe s’il dirigeait un réseau international de trafiquants de cocaïne ! Cela ne l’en rendait que plus malléable. Il filait le parfait amour avec les USA. La CIA chargée de veiller au grain était tranquille, sa créature faisant du « bon boulot ». Les opposants à l’ impérialisme US étaient sauvagement éliminés … jusqu’au jour où le bourreau s’était mis en tête de marchander durement le renouvellement du bail des USA sur le canal du Panama.

Mal lui en prit. Les rappels à l’ordre épuisés, le gouvernement américain lança contre lui un mandat d’amener pour … trafic de drogue. Les « Phantom » US foncèrent sur le Panama en novembre 1989. Leurs bombes écrasèrent au passage les quartiers entourant le palais présidentiel. Le « traître » ingrat est ramené menotté aux USA. Condamné d’abord à 40 ans de prison, sa peine fut réduite à 17 ans pour « bonne conduite » !

KH. Sebdou/K.B.