Complexe sidérurgique d’El-Hadjar Un désastre programmé par Mittal Arcelor avec la bienveillance des plus hautes autorités.

samedi 8 août 2009
par  Alger républicain

Un bureau d’études étranger français avait estimé la valeur du seul complexe à plus d’un milliard de dollars. Et un autre à 4 milliards. MIttal a pris possession de 70% du capital de l’usine et des mines de fer de l’Ouenza et de Boukhadra pour la somme … de 30 millions de dollars libérables sur 10 ans !
Prenant prétexte de la crise internationale du système capitaliste MittalArcelor annonce que ses projets de développement sont gelés. En fait de projets il n’y en a jamais eu. MittalArcelor a sévi en vampire se contentant de pomper les plus-values et de les transférer à l’étranger pour consolider ses positions dans d’autres pays.
Nous publions de larges extraits d’une étude publiée dans le quotidien national Liberté du 19 et du 20 octobre dernier, sous le titre “Des retards coûteux et inquiétants”. Son auteur, Rédha Amrani, est consultant en économie industrielle. Cette étude confirme en tous points les informations et analyses livrées par Alger républicain depuis 2003 sur la situation au complexe d’El-Hadjar.

La seule conclusion qui s’impose est que l’Etat algérien doit reprendre sans tarder le contrôle du complexe d’El-Hadjar et exiger de Mittal le versement d’indemnisations pour les préjudices causées à l’économie nationale.

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AR.

(Les intertitres sont de notre rédaction)

Stagnation et même régression

“La production … au complexe sidérurgique d’El-Hadjar gérée depuis 2001 par Arcelor Mittal stagne, pour ne pas dire régresse [...]
Or, “la consommation d’acier en Algérie … évaluée en acier liquide … atteint 5 millions de t en 2007 alors que la production locale stagne a 1,1 million de t d’acier liquide [...]
La gestion d’Arcelor Mittal Steel n’a apporté aucune augmentation de la production par rapport à celle de Sider au cours des douze années précédant la privatisation [...]
C’est donc un déficit de l’ordre de 4 millions de tonnes que subit notre économie.
Selon nos propres évaluations … la consommation d’acier liquide passerait en Algérie de 5 millions de t en 2008 à plus de 11 millions de t en 2020 [...]
Les 4 millions de t d’acier liquide de déficit en 2007 coûteraient 2,4 milliards de dollars, soit le coût d’investissement d’une usine sidérurgique complète basée sur la réduction directe et la technologie compacte de production d’acier et d’une capacité de 2 millions de t d’acier [...]
Tous les pays arabes ont investi : sauf l’Algérie passée de la première place à celle de bonne dernière [...]
Selon le rapport annuel de l’Union arabe du fer et de l’acier (UAFA), cette production est passée de 8,8 millions de t en 2000 à 17,09 millions de t en 2007.
La production mondiale d’acier liquide a presque doublé en dix années, passant de 780 millions de t à 1 420 en 2008, la production de la Chine progressant de 107 millions de t en 1998 à 520 en 2008. “

La stratégie de Mittal-Arcelor :
transformer l’Algérie en marché captif et investir ailleurs

“On a pensé que la privatisation de la sidérurgie algérienne et surtout sa vente à Arcelor Mittal allaient permettre de disposer à bon compte de l’acier nécessaire à l’économie et au développement économique qu’il devait entraîner. Or, la logique économique d’un leader international comme Arcelor Mittal obéit à des considérations loin des nôtre [...]
Lorsqu’on lit dans la presse qu’Arcelor Mittal veut développer la réduction directe de minerai de fer importé au port de Djendjen ainsi qu’un complexe sidérurgique de trois millions de tonnes à Bellara, on se demande si cela n’est pas un effet d’annonce pour dissuader d’autres investisseurs étrangers, comme l’Egyptien Elezz Steel ou les investisseurs de Qatar et des Emirats arabes unis, et se préserver le marché interne algérien (plus de 5 millions de tonnes de produits sidérurgiques par an, soit un marché de près de 4 milliards de dollars) pour ses entreprises disséminées à travers le monde … De toutes les façons, Arcelor Mittal a, en termes d’investissements dans la région, donné la priorité à la sidérurgie marocaine où il détient près de 64% d’actions, laissant la minorité de blocage de 35% aux décideurs locaux. Les complexes de Jorf Lasfar sur la côte Atlantique et de Nador sur la côte méditerranéenne sont en pleine expansion, et une nouvelle ligne compacte de produits sidérurgiques plats y est en fin de réalisation. Pourtant, cet accord de prise de participation par Arcelor Mittal ne date que de 2006 et non de 2001 comme en Algérie [...]
Pas d’investissements des entreprises publiques algériennes dans la sidérurgie pendant dix ans, c’est, entre autres, l’une “des conditions imposées par Arcelor Mittal aux autorités algériennes, en 2001, lors du rachat d’El-Hadjar.”

Bilan véritable de la privatisation :profits pour Mittal et pertes sèches irrécupérables pour l’Algérie

“En sept années de gestion du complexe sidérurgique d’El-Hadjar et des mines de fer de l’Ouenza et de Boukhadra, les investissements promis lors de la privatisation n’ont pas été réalisés. Seul un laminoir à rond à béton de 350 000 t/an y a été réalisé, et encore, Sider avait auparavant investi plus de 60 millions de dollars pour mettre à niveau le laminoir de produits plats laminés à chaud et surtout porté la capacité de l’aciérie électrique de 100 000 à 400 000 t/an avec une installation de coulée continue de billettes pour la production de ronds à béton. Arcelor Mittal n’a fait que finir cet investissement en installant ce laminoir sur un emplacement déjà aménagé par Sider.

La démultiplication des incidents techniques aux hauts-fourneaux, à l’aciérie à oxygène et aux centrales électriques internes s’expliquerait actuellement par l’absence des investissements courants et normaux de maintenance préventive … Arcelor Mittal vend les produits sidérurgiques aux prix internationaux sortie usine … Arcelor Mittal Steel, … est en fait un investisseur venu en Algérie pour faire du profit à moindre risque et au moindre coût … En sept années de gestion, Arcelor Mittal avait largement le temps et les moyens de réaliser les investissements d’extension et de mise à niveau sur lesquels il s’était engagé et pour lesquels il avait obtenu des concessions et des avantages incommensurables …

Arcelor Mittal disposait en outre dans notre pays d’un coût de l’énergie électrique, du gaz naturel, du minerai de fer et de la main-d’œuvre bas et dérisoire par rapport à ses concurrents et par rapport à ses autres installations à travers le monde.”

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Rédha Amrani