Grève illimitée à l’usine CÉVITAL de Béjaïa *

lundi 9 avril 2012

« Aujourd’hui, nous exigeons l’installation d’un syndicat en bonne et due forme pour mieux nous défendre en dépit des menaces et autres représailles qu’on nous réserve. »

L’usine Cevital de Béjaïa a été secouée hier par un mouvement de grève illimitée des travailleurs, le deuxième mouvement du genre que connaît ce groupe depuis le début de l’année en cours. Ils étaient plus de 300 travailleurs à afficher leur mécontentement suite aux « fausses promesses » avancées par la direction générale il y a quelques mois.

La contestation, déclenchée soudainement hier matin, gagne en ampleur par l’adhésion progressive des travailleurs. Interrogé sur les raisons qui ont déclenché ce mouvement de colère, une fois de plus, l’un des grévistes nous répond : « On nous a eus quelque part par naïveté et surtout par confiance.

Aujourd’hui, nous exigeons l’installation d’un syndicat en bonne et due forme pour mieux nous défendre en dépit des menaces et autres représailles qu’on nous réserve étant donné que ce n’est pas la totalité de l’effectif qui est en grève », affirme ce travailleurs parlant sous l’anonymat par peur de représailles.

Un autre ouvrier accuse le groupe Cevital de « fraudeur » en matière d’application des lois relative à la grille des salaires : « Hormis les 5% accordés suite à notre grève, rien n’est encore venu malgré les promesses avancées. Nous constatons même du favoritisme dans l’octroi de primes et autres augmentations. Nous exigeons tout simplement une grille des salaires et des primes à la hauteur de nos aspirations et des richesses qu’on crée pour cette société. »

Au lendemain de la première grève, les ouvriers du groupe Cévital et l’opinion publique se demandaient si Isaad Rebrab, le patron du groupe allait répondre à leurs doléances, s’il allait accepter l’installation d’un syndicat et s’il allait tenir aussi ses promesses. La réponse est désormais trouvée : « Rebrab n’a pas tenu ses promesses » disent les travailleurs à l’unisson.

Les « fausses promesses avancées »étaient faites juste pour « asphyxier la première contestation », ajoutent les travailleurs grévistes de ce groupe qui détient 60% du marché national en plus de ces intentions affichées d’investir le marché maghrébin et africain.

En dépit d’un mouvement de grève largement suivi au début de l’année, qui a alerté l’opinion publique locale nationale, voire même internationale, les revendications transmises et négociées avec les délégués mandatés par les travailleurs ne semblent pas trouver d’écho auprès du président-directeur général dudit groupe.

Pourtant, il a promis de répondre entièrement aux points inscrits sur la plate- forme de revendications des travailleurs. Il était acquis, comme nous l’avions déja rapporté, que l’immédiateté de la réaction du patron du groupe, qui avait d’où dépêché illico presto sur les lieux du piquet de grève son fils, Salim Rebrab, avait beaucoup plus étouffé le mouvement de grève que réglé les véritables problèmes posés par les travailleurs.

Sinon comment expliquer ce rebondissement et ce retour à la contestation au sujet des mêmes questions posées il y a de cela des mois ? En somme, même si l’ampleur de la grève n’est pas la même relativement au premier mouvement de protestation, il n’en demeure pas moins qu’elle a sérieusement secoué ce complexe agroalimentaire.

Dépourvus d’un conseil syndicat depuis la création du groupe en 1998, les travailleurs du groupe Cévital relevant du complexe agroalimentaire de Béjaïa se disent « privés de leur droit le plus fondamental », à savoir, celui relatif à l’exercice syndical par l’installation d’un conseil syndical pour mieux s’organiser, à même de faire entendre leurs revendications et défendre leurs droits auprès de leur administration relativement à la loi 90-14 régissant l’exercice du droit syndical.

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* Note de la Rédaction d’Alger républicain : cette grève a été passée sous silence par tous les autres journaux. Il va de soi que Rebrab, le patron de Cevital, exerce un énorme pouvoir financier. Il peut couper la publicité aux journaux qui feraient état du degré d’exploitation des travailleurs qu’il emploie et du déni de leurs droits syndicaux.

Rebrab est avant tout et surtout un des plus gros importateurs : sucre, café, voitures, véhicules industriels, matériel de reproduction, etc. La manne publicitaire Cevital, payée en fait par les consommateurs, se chiffre en milliards. Elle nourrit les actionnaires d’une multitude de journaux.

Il y a cinq ans, des travailleurs des ateliers de réparation de l’ex-Sonacome de Hassi-Ben Bouali, rachetés à vil prix pour être transformés en salons d’exposition de voitures importées, ou « show rom », avaient été licenciés arbitrairement pour avoir simplement demandé le respect des conditions fixées dans le cahier signé lors de la privatisation de ces ateliers. Ils ont eu beau faire un sit-in sur ce grand boulevard durant plus d’un mois et contacté des dizaines de journalistes pour qu’ils fassent écho à leurs protestations, aucun journal dit « démocrate » n’avait relaté leur action.

Quelques mois plus tôt une femme avait osé créé un syndicat UGTA dans une de ses filiales, la société d’importation de véhicules Hyundai. Elle a été chassée manu-militari. Là aussi nos journaux « démocrates » observèrent le silence le plus total. Les responsables de l’UGTA ne levèrent pas le petit doigt pour défendre leurs adhérents victimes de l’arbitraire patronal.

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Alger républicain