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Syrie : Un grand reporter britannique accuse l’ASL de manipulation criminelle – et pas mal de collègues de connivence avec les rebelles
mercredi 4 juillet 2012
Alex Thompson a pu constater "en live" les méthodes médiatiques de l’ASL. Et il en profite pour critiquer celles de pas mal de ses confrères...
Le journaliste britannique, Alex Thompson, qui couvre les événements de Syrie pour la chaîne d’information britannique Channel IV, vient de donner un éclairage crû sur certaines méthode de manipulations de l’ASL. Dans un article publié le 8 juin par le grand quotidien The Guardian, Thompson raconte que lui et son équipe avaient accompagné une équipe d’observateurs onusiens en route vers la ville d’al-Qusayr (à mi-chemin de Homs et de la frontière libanaise). Là, les journalistes britanniques ont été « pris en charge » par un groupe de quatre hommes armés se réclamant de l’ASL, et circulant à bord d’une voiture noire. Ceux-ci ont alors ont conduit froidement l’équipe de Thompson sur une route traversant une zone insécurisée – « a free fire zone » – pour que les forces syriennes tirent par erreur sur eux et qu’ainsi soit jeté un nouvel opprobre médiatique contre le régime et l’armée.
Le grand reporter anglais raconte qu’effectivement, une fois leur véhicule engagée dans le no-man’s land, un poste militaire a commencé à tirer sur leur véhicule. Le véhicule des Anglais a d’abord tenté de se réfugier dans un chemin de traverse, qui s’est avéré être une impasse. « Il n’y avait pas d’autre option, raconte Thompson au Guardian, que de sortir de ce champ de tir et de reprendre en sens inverse la route où l’on nous avait conduits. Comme il était prévisible, la voiture noire qui nous avait menés dans ce piège était toujours là. Elle a démarré qu’elle nous aperçus. »
Pour les lecteurs du Guardian, Alex Thompson tire la morale de cet incident : « Il est parfaitement clair pour moi que les rebelles nous ont délibérément tendu un piège pour que nous soyons tués par l’armée syrienne. Des journalistes (occidentaux) tués, c’est mauvais pour Damas ! »
De ce cynisme des ASL, Thompson et ses amis ont une une confirmation une heure et demie plus tard : la même voiture noire de rebelles a soudain jailli d’une voie latérale les coupant du convoi des casques bleus. Lesquels ont d’abord rétrogradé pour se rapprocher d’eux, puis voyant l’équipe britannique entourée de « miliciens en train de crier » ont finalement préféré s’en aller, abandonnant Thompson et ses collègues. Qui finalement ont pu regagner Damas.
Critique méthodologique implicite des confrères occidentaux
Les quatre ASL d’al-Qusayr ont commis un sacré faux-pas : Alex Thompson est une grande figure du reportage de guerre britannique, qui a couvert depuis 20 ans pour Channel 4 nombre de conflits, en Irak, en Yougoslavie, en Afrique, en Afghanistan. C’est une autorité en la matière. Il a accordé une interview intéressante au site Russia Today sur sa récente expérience syrienne que nous traduirons bientôt. Entré légalement en Syrie, il a pu accéder à une zone rebelle sans avoir été « pris en mains » de A à Z comme nombre de ses collègues par les rebelles, suite à une entrée clandestine via une filière d’opposants. Cela change, dans le sens d’une plus d’objectivité, le regard porté sur la situation. Thompson le dit lui-même :
« C’est un fait. La plupart des journalistes occidentaux qui couvrent le conflit du côté rebelle sont emmenés clandestinement depuis le Liban et entrent donc illégalement en Syrie. Il est très inhabituel, on n’en a pratiquement jamais eu d’autre exemples, de faire ce que nous (l’équipe de Channel 4) avons fait, c’est-à-dire partir de Damas, franchir les lignes de front avec la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge, et parler aux deux camps ».
En effet. Et là, implicitement, le grand professionnel qu’est Alex Thompson met en cause la méthodologie – et donc la déontologie – de nombre de ses collègues d’Occident qui, pris en charge par les rebelles du début à la fin de leur reportage, tendent à épouser leur point de vue et leur cause. On a d’ailleurs eu un précédent fameux de cet état de choses et des conséquences médiatiques : les journalistes intégrés – « embedded » – aux forces américaines en Irak.
Aujourd’hui les journalistes formatés et formateurs, qui prétendent ne plus tomber dans ce panneau propagandiste-là, reproduisent exactement la même chose avec l’ASL en Syrie : ils sont « embedded » avec elle !
Édith Bouvier a certes fait preuve de courage à Homs mais elle est un cas-typique de journalisme connivent, et "embedded" avec les insurgés...
Par Louis Denghien,
le 9 juin 2012