Texte de la contribution du Parti Algérien pour la Démocratie et le Socialisme à la 14°Rencontre internationale des Partis communistes et ouvriers de Beyrouth

vendredi 14 décembre 2012

La crise du capitalisme ne cesse de s’approfondir. Elle aiguise les contradictions de classe. La classe ouvrière, les travailleurs et les jeunes, résistent de plus en plus, dans un nombre croissant de pays, à l’offensive des oligarchies financières, soutenue par la sociale-démocratie, contre les conquêtes sociales du mouvement ouvrier. Les rivalités inter impérialistes pour l’extension des zones d’influence et le contrôle des sources et des voies de transport du pétrole, du gaz et de l’uranium, s’accentuent. Dans le même temps les puissances impérialistes occidentales coordonnent leurs opérations pour tenter de briser par tous les moyens les États des pays économiquement faibles qui refusent de se plier complètement ? leur diktat, y compris des États dirigés par la bourgeoisie.

L’extension des foyers de guerre au Moyen Orient s’inscrit dans cette stratégie impérialiste. La Syrie est l’objet d’une agression coordonnée d’une ampleur sans précédent des forces de l’impérialisme, du sionisme et de la réaction moyenâgeuse monarcho-théocratique. C’est le point du monde sur lequel les impérialistes américain, anglais et français concentrent leurs efforts non seulement pour briser un pays qui refuse d’obéir à leurs ordres mais aussi pour entourer d’une ceinture d’États hostiles les nouvelles puissances impérialistes russes et chinoises.

Les États impérialistes encouragent la nouvelle agression israélienne contre le peuple palestinien à Gaza. Ils encouragent les préparatifs de guerre d’Israël contre l’Iran et cherchent à tirer profit des contradictions internes de ce pays pour s’emparer de ses richesses pétrolières. En Libye les forces réactionnaires installées au pouvoir par l’OTAN se heurtent à une résistance croissante du peuple qu’elle réprime de façon féroce. Dans ce pays, le fait principal est la lutte pour chasser les interventionnistes impérialistes et leurs supplétifs locaux.

La situation est préoccupante aussi au Sahel et au Mali. Les ingérences impérialistes sont devenues manifestes au nom soi-disant de la lutte contre le terrorisme islamiste et le séparatisme touareg. Leur but est évident : créer le chaos pour justifier l’intervention des impérialistes américains et français en vue de contrôler le sous-sol de cette vaste région et de briser les mouvements populaires antiimpérialistes qui leur résistent. Leur objectif à long terme est de poursuivre leur plan d’encerclement de l’Algérie en vue de détacher d’elle les zones pétrolières et gazières. A l’aide de leurs pressions continues les États impérialistes tentent d’obtenir dès maintenant la dénationalisation des hydrocarbures et l’autorisation d’installer des bases militaires au Sahara. Les régimes libyen et marocain jouent un rôle important dans cette stratégie. La monarchie marocaine exécute à la lettre les plans impérialistes en contre-partie du soutien des USA et de la France à l’occupation du Sahara occidental. Les interventions de Qatar dans cette région font partie d’une répartition des tâches décidée par les impérialistes américains et français.

Les révoltes et manifestations politiques et sociales qui agitent de nombreux pays arabes depuis le début de l’an dernier sont fondamentalement l’expression de contradictions enchevêtrées profondes internes et externes.

Ces révoltes expriment à la fois et dans de grandes confusions idéologiques le refus des masses populaires arabes de payer les conséquences de la crise mondiale du capitalisme, leur aspiration aux libertés démocratiques d’organisation et d’expression, à la désignation et au contrôle démocratiques des gouvernants. Le développement des rapports capitalistes dans ces pays, la domination impérialiste et la dépendance économique, le pillage massif de leurs ressources, l’accentuation des inégalités de classe, la misère épouvantable de larges fractions du peuple, les luttes du prolétariat et de la paysannerie contre l’exploitation capitaliste et les vestiges pré-capitalistes, les contradictions d’intérêts et les luttes pour l’hégémonie au sein du pouvoir entre les diverses fractions bourgeoises, tout cela a fait mûrir des exigences de changements radicaux, y compris dans les pays où la petite-bourgeoisie a exercé le pouvoir de façon hégémonique et pendant longtemps, souvent avec des progrès sociaux réels, comme cela a été le cas en Libye sous El Kaddafi.

La question centrale n’est pas la question posée de façon abstraite “démocratie ou despotisme” mais “État démocratique bourgeois antipopulaire et inféodé à l’impérialisme ou république démocratique populaire antiimpérialiste créant les conditions du passage à la voie socialiste” Les caractéristiques à l’échelle mondiale de l’époque actuelle, celle de la lutte pour le passage au socialisme, ne permettent pas de poser autrement les questions démocratiques dans cette partie du monde.

Les peuples arabes refusent de continuer à vivre comme avant . Mais la situation diffère d’un pays à un autre.

Certains régimes arabes sont des républiques formelles mais les libertés démocratiques doivent être conquises par la lutte. Les oligarchies pétro-monarchiques utilisent la religion pour justifier l’oppression et l’arbitraire le plus absolu. Leurs intérêts sont étroitement liés aux régimes impérialistes. L’argent volé à leurs peuples se trouve dans les banques des pays impérialiste et sert à la reproduction du système impérialiste à l’échelle mondiale. La férocité avec laquelle des millions d’ouvriers originaires d’Asie sont exploités par les multinationales n’est possible que grâce à l’appui de ces régimes les plus rétrogrades de la planète qui sont à leur tour soutenus par les puissances impérialistes.

Les régimes qui manifestent leur refus du diktat des puissances impérialistes sont la cible des attaques coordonnées des USA, de l’Union européenne, de l’OTAN, d’Israël, des monarchies et des théocraties du Golfe, des médias de la ploutocratie internationale. Cela est vrai même si ces régimes sont dans leur fondement socio-économique des régimes capitalistes.

Des contradictions opposent dans les pays arabes diverses fractions de la bourgeoisie sur les meilleurs moyens de renforcer ou de maintenir leur domination sur les masses autant que sur le rééquilibrage entre elles des positions de force dans l’exercice hégémonique du pouvoir les unes aux dépens des autres. Partout des fractions entières de la bourgeoisie alliées aux petits potentats féodaux utilisent de façon éhontée l’Islam. De larges fractions politiquement et idéologiquement inexpérimentées de la classe ouvrière et de la paysannerie laborieuse font leurs premiers pas dans les luttes sociales modernes en cherchant dans la religion un appui à leurs aspirations à la justice sociale. Les courants bourgeois les plus réactionnaires tentent de canaliser le mécontentement populaire pour l’empêcher de se transformer en torrent révolutionnaire de nature à poser avec force la question de la propriété des moyens de production, de la répartition des richesses, du contrôle des multinationales et de la nature sociale du pouvoir.

La religion est utilisée comme paravent à l’instauration d’une dictature ouverte des forces de l’argent afin d’empêcher la jonction des partis communistes avec le mouvement spontané des masses populaires et de la classe ouvrière. Elle est utilisée pour les empêcher d’apporter la conscience idéologique aux travailleurs, de transformer la classe ouvrière en classe d’avant-garde consciente, organisée et dirigeante dans la lutte pour le progrès et le socialisme. Pour détacher les travailleurs de l’influence réactionnaire des forces qui utilisent l’Islam, pour isoler ces forces, les communistes doivent refuser les tentatives de cercles petits-bourgeois “laïcistes”de déplacer le centre de gravité de la lutte politique, idéologique, économique et sociale, à partir de la clarification du contenu économique des positions des différentes forces politiques adverses vers les questions abstraites de “modernité” ou de religion. Nous sommes partisans de la séparation de la religion et de l’État mais cette question ne peut être mise au centre de notre travail d’agitation quotidien. Comme l’a montré la Révolution d’Octobre 1917 elle est tranchée dans le cours même des luttes résolues pour l’instauration de l’État des ouvriers et des paysans.

En Algérie la démocratie de façade instaurée en 1989 après le soulèvement populaire d’octobre 1988 ne bénéficie en réalité qu’aux forces de l’argent. Les courants bourgeois s’entendent tous pour étouffer le mouvement ouvrier indépendant en le paralysant par des lois syndicales et sociales scélérates ou des lois sur les partis et les associations qui le mettent sous le contrôle du ministère de l’Intérieur.

Les ingérences impérialistes en Algérie sont devenues de plus en plus ouvertes. Un travail intense est mené par les ambassades et l’Union européenne pour enrôler des jeunes dans des ONG soi-disant chargées de défendre les droits de l’homme.

Des officiers supérieurs de l’armée qui avaient combattu les groupes armés islamistes sont menacés de poursuites devant le Tribunal Pénal international. Le régime bourgeois de l’Algérie a plus peur des masses populaires que de l’impérialisme. De par sa nature de classe il est incapable de chercher l’appui des masses populaires en satisfaisant leurs revendications sociales et politiques. Il cherche la “compréhension” de l’impérialisme en changeant les règles de la fiscalité pétrolière, en démantelant les tarifs douaniers et en leur accordant des avantages inimaginables.

En ce qui concerne la Syrie, notre parti juge qu
’il est “évident depuis déjà l’an dernier que l’insurrection armée en Syrie ( …) n’a rien à voir avec un quelconque combat pour les libertés démocratiques et le progrès social. L’insurrection armée est le fait de groupes qui cachent de moins en moins leur volonté d’instaurer un État sectaire, remettant en cause la liberté de conscience et les libertés confessionnelles et utilisant l’Islam pour faire accepter par les travailleurs et la paysannerie une exploitation des plus féroces."

Le régime politique, social et économique instauré par le baath syrien et qui a évolué ces dernières années de façon négative en adoptant des mesures anti populaires de libéralisation n’incarne pas notre idéal de communistes.

Mais il est impossible de le placer sur le même plan que les terroristes islamistes et les puissances impérialistes. L’insurrection armée en Syrie a un caractère nettement réactionnaire, en raison des objectifs obscurantistes et de la vision sociale et économique ultra-libérale de ses chefs, en raison de sa dépendance politique, financière et militaire des pays impérialistes et des monarchies théocratiques du Golfe, en raison de son rôle de bras armé de cette coalition de forces étrangères. Nous considérons que la responsabilité principale des malheurs qui se sont abattus sur le peuple syrien incombe aux dirigeants et aux politiciens bourgeois ou sociaux-démocrates des pays impérialistes.

Les communistes algériens s’inspirent de la riche expérience accumulée par le mouvement communiste international dans la lutte antifasciste. Cette lutte avait conduit à la conclusion d’unions temporaires conditionnelles avec d’autres couches sociales pour contrer à un moment donné un ennemi qui remet en cause par la violence la plus extrême les conquêtes démocratiques, sociales et nationales de la classe ouvrière et des peuples.

Nous estimons qu’aucun révolutionnaire ne peut placer sur le même plan la violence contre-révolutionnaire des groupes armés soutenus par l’impérialisme et les monarchies du Golf et la répression légitime de l’activité de ces groupes. La lutte indispensable pour les libertés démocratiques les plus larges au profit de la classe ouvrière et des couches laborieuses est intimement liée à la résistance à l’agression impérialiste. Elle est liée au combat pour liquider les forces de la réaction interne par les moyens militaires et politiques, par une politique sociale en faveur des masses. Dans une situation comme celle de la Syrie, les luttes démocratiques ne peuvent être dissociées des luttes pour infliger une défaite cinglante à l’impérialisme, pour mettre en échec sa prétention à décider à la place des peuples qui doit les diriger. Aucun parti révolutionnaire ne peut conquérir un rôle dirigeant, indépendant de la bourgeoisie, s’il ne participe pas les armes à la main à la résistance antiimpérialiste, s’il ne déploie pas tous ses efforts pour entraîner les masses dans cette résistance.

C’est en remplissant ces tâches qu’il peut imprimer à cette résistance antiimpérialiste le contenu économique et social de classe le plus avancé au profit de la classe ouvrière, des couches populaires laborieuses, même s’il doit s’allier temporairement à d’autres forces au pouvoir que l’impérialisme veut déloger par la force et les remplacer par des valets à ses bottes. Ce sont ces luttes qui créent les meilleures conditions pour que le parti révolutionnaire de la classe ouvrière arrive à conquérir un rôle dirigeant.

Nous saluons nos camarades syriens dans cette bataille historique difficile et qui a une portée immense pour l’ensemble des peuples. Nous espérons de tout cœur qu’ils réussissent dans le feu de ces luttes à entraîner les travailleurs dans la victoire sur les forces de l’impérialisme et de la réaction interne, dans la conquête des libertés démocratiques et du progrès social.

Source : http://www.lien-pads.fr