Le Parti communiste brésilien sur la crise politique

mercredi 18 mai 2016

La droite brésilienne actionnée par les USA est résolue à mener à son terme le processus qu’elle a engagé pour la destitution de Dilma Roussef de la présidence du Brésil.

Nous publions l’analyse que le parti communiste brésilien a livrée il y a quelques semaines sur cet événement. Elle contient une appréciation critique de la politique de collaboration de classe avec la bourgeoisie que le Parti des travailleurs a pratiquée depuis son arrivée au pouvoir avec Lula.

Elle permet de comprendre de façon correcte les raisons qui ont poussé la bourgeoisie à décider de se débarrasser de Dilma Roussef en même temps que la perte de confiance de la grande masse des travailleurs pour celle-ci.

On y trouvera aussi la position du PCB sur la question du soutien ou du refus du soutien à apporter à la présidente brésilienne au vu de ses orientations conciliatrices avec le capitalisme qui l’ont coupée des travailleurs.

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Alger républicain
18.05.16

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Non à la procédure d’empêchement

Non au gouvernement de collaboration de classe

Organisation et mobilisation des travailleurs et des mouvements populaires pour un bloc de lutte de caractère anticapitaliste

Le PCB respecte les forces sociales et politiques de gauche et du camp démocratique qui seront dans les rues dimanche prochain, mobilisées par des préoccupations sincères devant l’offensive de la droite dans notre pays, et pour beaucoup d’entre elles, encore attachées aux rêves d’un tournant vers la gauche du PT, maintenant ou en 2018, d’une lutte acharnée pour démocratiser, réformer et humaniser le capitalisme. Nous recherchons le dialogue et la construction d’une unité d’action avec ces forces, dans la défense des libertés démocratiques, et pour les droits de la classe ouvrière, en particulier avec celles qui considèrent que la lutte prioritaire est de caractère anticapitaliste, dans les rues et les lieux de travail, sans illusion sur un projet de plus en plus disqualifié de conci-liation de classe.

Le PCB a dénoncé les manœuvres que des composantes de la bourgeoisie, majoritaires, ont entreprises pour renverser le gouvernement, non pas parce que celui-ci serait de gauche ou même réformiste, mais parce qu’en raison de ses contradictions, il retarde la radicalisation des politiques d’austérité exigée par le capital. La droite manipule les médias dominants, l’activisme politique de pans de la justice, les failles que la démocratie bourgeoise leur assure pour exercer leur dictature de classe. Elle le peut surtout parce que le PT a creusé sa propre tombe avec sa politique la collaboration de classe.

Nous identifions également comment la bourgeoisie essaie de faire porter sur le seul PT la responsabilité de la corruption, qui est systémique dans le capitalisme, et qui finance outrageusement tous les partis et institutions politiques. Le PCB dénonce le cynisme et la duplicité qui caractérisent la procédure d’empêchement, conduite par un individu clairement corrompu lui-même qui, tout en accélérant l’empêchement de la Présidente, manœuvre pour évacuer son propre dossier du Conseil d’éthique de la Chambre.

Au cours des derniers mois, nous avons participé à plusieurs actions qui pourraient nous ranger parmi les adversaires de la procédure d’empêchement. Elles étaient articulées, sur une base de gauche, avec la protestation contre le gouvernement de collaboration de classe. Mais les actions de ce dimanche seront marquées exclusivement par la défense du gouvernement Dilma/Lula. Par ailleurs, mercredi dernier, 13 avril, devant le risque d’approbation par la Chambre de l’empêchement, Dilma s’est rendue entièrement à la bourgeoisie, en déclarant que, si la procédure était rejetée, le lendemain même, elle lancerait « un pacte national – sans perdants ni vainqueurs - incluant l’opposition ».

Donc, nous l’avons dit clairement : nous ne participerons pas aux actions pour défense du gouvernement Dilma/Lula organisées ce dimanche 17 avril. Pour le PCB, il est impossible de défendre un gouvernement qui annonce déjà un virage encore plus à droite, une acceptation plus profonde encore du projet de la bourgeoisie, encore plus d’ajustements et de politiques de droite.

Depuis mars 2015, lorsque la droite a lancé le sujet de l’empêchement, le PCB a dit clairement que, quel que soit le résultat, les travailleurs allaient perdre plus encore que ce qu’ils ont perdu dans ces 13 ans de collaboration de classe sous des gouvernements PT. Nous avons toujours affirmé que la bataille pour garder à tout prix un gouvernement PT n’amènerait pas un virage à gauche, mais un virage à droite, cédant plus de place aux intérêts du capital. Depuis le début de ce roman de mauvais goût, le PT n’a fait que pousser davantage les politiques d’ajustement et les privatisations néolibérales, ainsi que les accords cherchant une base de soutien plus conservatrice.

Les gouvernements PT, issus des mouvements syndicaux et sociaux, ont trompé et désarmé les travailleurs et, pour couronner le tout, construit un cadre juridique pour assurer l’ordre bourgeois et réprimer les luttes populaires : maintien de la loi de sécurité nationale, création de la Force nationale et adoption des décrets d’application de cette loi et de la loi anti-terrorisme récemment proposée et actée par la présidente.

Indépendamment du résultat du vote de l’Assemblée en séance plénière, nos efforts se concentreront, de plus en plus, dans l’articulation d’un bloc de luttes anticapitaliste et anti-impérialiste, visant à l’unité d’action autour de luttes communes. Nous n’allons pas nous disperser dans le débat sur la gestion du capitalisme – qui va continuer encore pendant des mois de procédures au Sénat et devant la Cour suprême, de manifestations pro ou anti Dilma - tandis que le programme conservateur et néolibéral avance et que le rapport de force se dégrade pour les travailleurs.

Tous les efforts des communistes et des autres forces anticapitalistes, à partir de maintenant, devraient se concentrer sur l’organisation et la mobilisation des travailleurs et des mouvements populaires pour faire face à l’offensive du capital. L’issue est sur la gauche, avec la formation d’un bloc de lutte de caractère anticapitaliste, avec une unité d’action autour d’un programme minimum qui puisse exprimer les revendications de la classe ouvrière pour l’emploi, la terre, le logement, les droits et libertés, dans la perspective de la construction du pouvoir populaire et sur le chemin vers socialisme.

Le PCB propose de réaliser, dans la première moitié de l’année prochaine, une rencontre nationale de la classe ouvrière et du mouvement appelant à un 1er mai de classe, unitaire, dans toutes les villes où ce sera possible, à des initiatives visant fondamentalement l’unité d’action nécessaire dans la lutte anticapitaliste.

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Comité central du PCB - Parti communiste brésilien,

16 avril 2016